Après un périple de plus de 14h depuis le Laos, nous arrivons enfin à Phnom Penh. Le court trajet depuis la station de bus jusqu’à l’hôtel suffit pour constater que la ville rime avec tourisme sexuel, ordures et pollution. Malgré cette première impression négative, il est intéressant de s’arrêter dans la capitale pour mieux comprendre l’histoire de ce pays dont le traumatisme récent des Khmers rouges est encore bien ancré dans les mémoires.

La ville n’a pas vraiment d’intérêt mais Phnom Penh est souvent le point d’entrée pour visiter le reste du pays, alors voici comment occuper ses journées.
Que voir et que faire à Phnom Penh ?
Visiter la prison S-21 musée du crime génocidaire : la machine de mort des khmers rouges
La visite la plus dure de ma vie. Et je pèse mes mots. J’ai eu la « chance » de visiter le camp de concentration du Struthof en Alsace avec un historien qui avait fait sa thèse dessus. En sortant de là, je peux dire que j’ai mis quelques heures à m’en remettre. Là, ça m’a fait le même effet, je suis sortie avec les boyaux retournés.

Un peu d’histoire : la dictature des khmers rouge et le génocide cambodgien
Les khmers rouges sont le surnom d’un mouvement politique communiste radical qui a pris le pouvoir au Cambodge en 1975 après plusieurs années de guerre civile.
Leur idéologie politique était de créer une société communiste sans classes, purgée de l’influence capitaliste, coloniale et religieuse. Les citadins en particulier sont visés en premier car ils sont marqués par la « corruption » et la « débauche ».
Dès le lendemain de la prise du pouvoir, sous prétexte de bombardements américains imminents (il y en avait eu beaucoup sur la piste Ho Chi Minh non loin de là), ils réussissent à faire évacuer l’intégralité de la ville de Phnom Penh en 2 jours seulement. 2 millions d’habitants entament alors une longue marche vers les campagnes dans des conditions désastreuses. 10 000 personnes périssent en chemin. Les autres villes du pays connaissent le même sort dans les semaines qui suivent. Ceux qui ne voulaient pas abandonner leur maison étaient tués sur le champ.
Tous les habitants ont été mis aux travaux forcés dans les champs et/ou étaient incarcérés pour des prétextes les plus variés. Depuis le seul fait de porter des lunettes -trop intellectuel au goût du dictateur Pol Pot- jusqu’à la dissidence politique réelle (ou plutôt supposée…).
La prison S21 de Phnom Penh était l’une des machines à tuer les plus puissantes du régime…
Entrée : 5 US$ + 3 US$ avec audioguide. Tout d’abord, je conseille à tout le monde de prendre le supplément audioguide. L’histoire racontée t’immerge pendant toute la durée de la visite.

Le site est en fait un ancien lycée reconverti en prison. 15 000 personnes ont été détenues ici, 14 en sont ressorties vivantes… On entre directement dans le vif du sujet avec les salles de torture et la photo des cadavres tels qu’ils ont été retrouvés lors de chute des khmers rouges en 1979. (On a le choix de ne pas rentrer dedans)


On demandait aux détenus torturés d’avouer des fautes qu’ils n’avaient pas commises dans des confessions transcrites sur du papier. Lorsque les confessions ne satisfaisaient pas les interrogateurs, les détenus étaient de nouveau torturés, jusqu’à ce qu’ils écrivent des confessions jugées recevables. Les tortionnaires donnaient aux détenus des idées d’aveu : par exemple un lien avec la CIA, le KGB, ou encore un quelconque système démocratique, capitaliste, ou impérialiste. On passe aussi par la potence, utilisée comme moyen de torture. On pendait les détenus par les bras (dans le dos) pour les faire avouer. Quand ceux-ci tombaient dans les pommes (inévitable), on les réanimait en les trempant dans des jarres pleines d’excréments… quand ils reprenaient conscience, on les rependait immédiatement…
On continue la visite dans les différents bâtiments qui exposent les milliers de visages des détenus, le système bien rodé de la prison et aussi les salles de détention d’1,5m²… On regarde un film où 3 survivants témoignent de l’horreur qu’ils ont vécu dans ces lieux. Le parcours se fait en 2h minimum. En sortant, on passe devant 2 des survivants qui ont écrit leur livre. Quel moment émouvant de se retrouver là, face à ces hommes qui ont vécu l’horreur avec un grand H.

Un moment dur, poignant, cauchemardesque mais indispensable pour saisir l’ampleur du traumatisme qu’ont vécu les cambodgiens il y a seulement 40 ans… 1,7 millions de cambodgiens soit 20% de la population globale de l’époque ont été exécutés. On parle aujourd’hui d’auto-génocide.
Killing fields, le camp d’exécution des khmers rouges
Ceux qui se sentent encore le courage peuvent se rendre aux killing fields après la prison. On devait les visiter mais j’ai tellement été secouée que je n’en avais plus très envie. Il s’agit du champ où étaient exécutés la plupart des détenus. Car même si certains mourraient à la prison, le massacre en masse avait lieu ailleurs, à quelques kilomètres de là. Chaque nuit, des camions venaient récupérer les condamnés à mort. On les amenait yeux bandés dans cet endroit où ils recevaient des balles ou simplement des coups de pelle dans la nuque (pour économiser les balles). Les bébés étaient frappés contre un arbre… Bref, il faut avoir le cœur bien accroché.
Visiter le palais royal et la pagode d’argent
(Entrée : 10 US$, s’habiller correctement : ni short, ni débardeur) Le palais héberge la famille royale. L’ensemble des bâtiments est assez récent car ces derniers ont tous été édifiés au début du XXème siècle. Il faut dire que le parc est assez joli avec son architecture khmer typique et ses couleurs clinquantes. Ceci-dit, on en fait vite le tour car on ne peut pas tout visiter.

Quant à la pagode d’argent, on remercie le routard de nous avoir expliqué d’où vient le nom. Le sol de la pagode est en fait recouvert de carreaux d’argent sauf que ceux-ci sont recouverts d’un tapis pour éviter de les abîmer…
Admirer les collections du musée national des beaux-arts
(Entrée : 10 US$) Bon, on y a fait un tour car on avait le temps. Mais pour être honnête, on trouve le prix de l’entrée très cher. On y voit des sculptures qui proviennent de différents temples cambodgiens en particulier Angkor mais aussi des objets.

Faire un tour au marché central
Le marché central n’est pas le plus authentique des marchés asiatiques. La section consacrée à la nourriture (toujours ma préférée – malgré les odeurs) est très petite. Par contre, on y trouve quantité monstre de babioles en tout genre pour faire des cadeaux de voyage. Chaque aile comporte sa propre spécialité : orfèvrerie, coiffeurs, toiles, tissus, etc. Intéressant mais pas indispensable.
Bilan : Pour ceux qui auraient déjà visité des capitales de pays asiatiques, Phnom Penh n’a que peu d’intérêt. Sale, polluée, encombrée, vraiment, on a trouvé qu’il y a mieux ailleurs.
Infos utiles
Où dormir à Phnom Penh ?
RS II Guesthouse : placé à proximité du palais royal et d’une rue avec pleins de restos. Les chambres sont très corrects, avec sdb privée, pour un prix défiant toute concurrence (9,5€ la nuit pour 2). Pas de petit dej mais il y a un café juste en-dessous.
Où manger à Phnom Penh ?

Petit-déjeuner : Coffee Today : une chaine de café qui avait l’avantage d’être juste à côté de notre guesthouse
Happy Damrei Eatery : reste ouvert tard et les pizzas sont très bonnes.
Kabbas : du local, bon et pas cher. Tout ce qu’on aime.
Rejoindre Siem Reap depuis Phnom Penh
Nous avons pris la compagnie de bus Giant Ibis. Mais alors QUELLE différence par rapport à notre trajet depuis le Laos. On nous cherche à l’hôtel. Le bus est grand, propre, part à l’heure. Il y a des prises, de la wifi. L’hôtesse annonce les temps de trajet, les durées des arrêts. On nous a servi une brioche aux pépites de chocolat le matin. On a fait 2 stops sur la route vers Siem Reap, à chaque fois dans des endroits très propres et sympathiques. On est même arrivé un peu avant l’heure prévue. Le tout pour 14 US$ chacun. Il en faut peu pour être heureux.
Une réflexion sur “2 jours à Phnom Penh, la capitale cambodgienne”